Un geste inattendu a attiré mon attention récemment, la lettre de félicitations du président américain Donald Trump aux musulmans pour le mois de Ramadan. Dans ce message, Trump a salué la riche tradition de Ramadan et souligné que la liberté religieuse fait partie intégrante du mode de vie américain. Un autre moment marquant a été la diffusion d’une vidéo qui a fait le tour des réseaux sociaux, montrant des policiers américains offrant de la nourriture à des musulmans. Ce geste de solidarité, bien qu’inusité, a suscité l’admiration. Mais qu’en est-il dans des pays comme le Liban et peut-être même l’Égypte et ailleurs, où musulmans et chrétiens cohabitent depuis des siècles dans une complexité sociale et religieuse ? Comment cette coexistence se vit-elle au quotidien, loin des projecteurs ?
Chrétiens et musulmans : marcher ensemble pour la paix
Avant d'aborder le sujet, il est important de rappeler un message sous la signature du Cardinal Georges Jakob Koovakad adressé à l'occasion du Ramadan et de l'Aïd El-Fitr 2025. Dans ce message, le dicastère pour le Dialogue Interreligieux appelle les chrétiens et les musulmans à une transformation intérieure commune. Soulignant la coïncidence entre le Carême chrétien et le jeûne musulman, il invite les deux communautés à marcher côte à côte, unies dans une démarche de purification, de prière et de charité. Cette période spirituelle est ainsi présentée comme une occasion unique de témoigner ensemble d’un espoir partagé pour la justice, la paix et la fraternité, dans un monde en quête de réconciliation.
Au Liban
À l’occasion du mois sacré de Ramadan, le président du Liban, Michel Aoun, a adressé ses vœux aux musulmans du pays, précisant la beauté de la coïncidence entre le début du Ramadan et le Grand Carême chrétien. Cette période permet aux Libanais, quelles que soient leurs confessions, de partager les valeurs spirituelles illustrées par le jeûne, symbole de liberté et d’engagement. Il a ajouté que ce moment de prière collective qui reflète l’unité et la diversité qui caractérisent le Liban, un pays « modèle » de coexistence.
Un bel exemple de coexistence interreligieuse au Liban se manifeste par l'initiative de plusieurs chrétiens qui choisissent de jeûner pendant le mois de Ramadan aux côtés des musulmans. Parmi eux, Christine, une chrétienne libanaise de 29 ans, a décidé de vivre cette expérience pour la première fois cette année. Pour elle, ce geste symbolise le modèle de coexistence au Liban, un pays où les différences religieuses ne sont pas un obstacle à l'unité, mais une richesse à célébrer.
Un autre exemple de cette solidarité interreligieuse se trouve à Tripoli, où le maire a demandé aux habitants de la ville de s'abstenir de manger en public pendant le mois de Ramadan, invoquant le respect de « la sensibilité des musulmans ». Malgré les divergences religieuses, la solidarité sociale se renforce durant ce mois de jeûne. Musulmans et chrétiens unissent leurs efforts pour soutenir les plus démunis, sans distinction de confession. Cette entraide reflète un Liban fidèle à ses valeurs de coexistence et de solidarité, en dépit des crises successives qu'il traverse.
Dans un contexte de crise économique croissante, ces initiatives sont cruciales pour apporter un soulagement à une population durement touchée. Le jeûne, au-delà de sa dimension spirituelle, devient ainsi un symbole de résilience et d'unité face aux défis.
Le Ramadan au Liban illustre magnifiquement la coexistence entre musulmans et chrétiens, symbolisée par des traditions partagées et un esprit de solidarité. Dans ce pays où 40 % de la population est chrétienne, le mois sacré devient une occasion de renforcer les liens entre communautés. Musulmans et non-musulmans participent ensemble aux dîners Iftar, et les événements de charité sont ouverts à tous, quelles que soient les croyances. Des traditions comme le Mesaharati, qui réveille les habitants avant le Sohor, et des rassemblements communautaires à Tripoli témoignent de cette belle harmonie. Les festivités du Ramadan au Liban témoignent d'une véritable culture de coexistence et de respect mutuel, où chacun, indépendamment de sa foi, peut vivre et célébrer ensemble.
En Égypte
Le mois de béni en Égypte se caractérise par une forte solidarité et une coexistence harmonieuse entre les communautés musulmanes et coptes. En dépit de leurs différences religieuses, les deux communautés se rassemblent autour des mêmes valeurs de générosité et de partage. Musulmans et coptes partagent des moments de joie et de soutien, particulièrement lors des repas de rupture du jeûne (Iftar), où l'hospitalité et les échanges sont omniprésents. La décoration et les festivités qui ornent à la fois les mosquées et les églises symbolisent l'unité et l'amour qui unissent les Égyptiens. Les coptes participent activement aux célébrations du Ramadan, en visitant leurs voisins musulmans et en les invitant à leurs repas, créant ainsi des liens renforcés. Ce mois sacré devient alors un moment de rapprochement entre les deux communautés, fondé sur des valeurs communes de tolérance, d’entraide et de respect mutuel.
À Al-Khussous, dans la province de Qalyoubia, la plus grande table de l'Iftar collectif a été organisée pour la quatrième année consécutive, réunissant 12 000 personnes sous le slogan « une seule table au milieu de nos familles », avec la participation de musulmans et de coptes. Cet événement montre parfaitement l'unité nationale, rassemblant les habitants de la région autour d'une même table pour échanger des vœux et célébrer ensemble le mois sacré de Ramadan et la fête chrétienne de la Pâque. Les habitants de toutes générations ont contribué à la préparation de l'événement, organisant l'espace, installant les tables et préparant les repas, créant ainsi un véritable esprit de solidarité et de coopération. Cette célébration annuelle est un moment précieux pour la communauté, renforçant les liens d'amitié et de fraternité entre les voisins, qu'ils soient musulmans ou chrétiens.
À travers le monde arabe, et particulièrement au Liban et en Égypte, le Ramadan se transforme en un puissant symbole de solidarité interreligieuse. Musulmans et chrétiens, en partageant des moments de prière, de générosité et d’entraide, nous montrent qu'il est possible de vivre ensemble, malgré les défis. Ce mois sacré devient une occasion précieuse de renforcer les liens humains, prouvant que les valeurs de paix et d'unité peuvent transcender toutes les frontières.
*Article paru dans le n°58 de notre magazine Iqra.
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Regard fraternel (n°49) - Un Ramadan sous le signe du partage et de l'unité en Grande Bretagne
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