La magie de Noël s’empare des capitales occidentales dès la fin novembre et tout au long du mois de décembre. Les rues s’illuminent de décorations scintillantes, d’arbres majestueusement ornés, et de guirlandes aux couleurs festives. Partout, l’ambiance chaleureuse des fêtes se fait ressentir, dans les vitrines des boutiques, les entrées des centres commerciaux, et même sur les façades des bâtiments et les entrées des immeubles.
Cette célébration tant attendue dépasse les frontières religieuses. Si Noël est ancré dans la tradition chrétienne, il est également devenu un moment privilégié pour tous, croyants ou non. C’est l’occasion de réunir les familles autour de repas raffinés et de plats soigneusement préparés. Les magasins et marques, eux, ne font pas de distinction, les publicités et promotions omniprésentes incitent chacun à se laisser tenter par des cadeaux, tandis que les marchés de Noël, installés sur les places publiques, ajoutent une touche féérique à cette période.
Mais qu’en est-il des célébrations dans les pays arabes et musulmans ?
Il faut savoir que la présence des chrétiens au Moyen-Orient et dans le monde arabe est un fait historique et culturel important. Ils célèbrent Noël comme tous les chrétiens à travers le monde, avec des chants de cantiques religieux et des célébrations dans les terres arabes. Il est important de souligner ce point, car certains, en occident, pensent, à tort, que le monde arabe est exclusivement musulman. Pourtant, les chrétiens y sont des millions.
De plus, il ne faut pas oublier que le monde arabe est le berceau du christianisme, et que la Palestine, notamment Bethléem, est la ville natale de Jésus-Christ, fils de Marie (que la paix soit sur lui). Cette région est non seulement un foyer spirituel pour les chrétiens, mais aussi un symbole de coexistence entre différentes religions à travers l’histoire. Dans cet article, nous vous emmenons à la découverte des capitales arabes et islamiques pour explorer ensemble l’atmosphère des fêtes de fin d’année.
Cela est particulièrement frappant dans une région marquée par les conflits et l’instabilité, notamment en Palestine, au Liban et en Syrie. Ces pays, bien que confrontés à de dures épreuves, restent des symboles de coexistence entre musulmans et chrétiens, témoignant d’un vivre-ensemble qui perdure malgré les défis.
Racines profondes et traditions riches des Églises orientales
Avec des origines enracinées dans les terres du Moyen-Orient, les Églises chrétiennes orientales, présentes principalement en Égypte, au Liban, en Syrie, en Palestine, en Jordanie et en Irak, mettent en valeur un riche héritage culturel et religieux. Ces Églises, où la langue syriaque est encore utilisée dans certaines liturgies, perpétuent les traditions millénaires de la région.
Au fil des siècles, elles ont développé des branches spécifiques, comme les Églises byzantine, syriaque, copte et arménienne, chacune portant des rites uniques. Bien que la célébration de Noël ait été introduite plus tardivement, fixée au 25 décembre, certaines de ces Églises continuent de célébrer la naissance du Christ le 6 janvier, dans une continuité avec leurs anciennes pratiques.
Les chrétiens orientaux, tout en s’adaptant aux influences européennes modernes comme l’introduction du sapin de Noël ou le personnage du Père Noël avec sa barbe blanche et sa tenue rouge et blanche, restent fidèles à des traditions locales. Leurs célébrations de Noël, marquées par des offices religieux tels que la messe de minuit, des chants, et des rassemblements communautaires, témoignent d’un profond sens de solidarité et de paix, malgré les défis auxquels ils font face aujourd’hui.
Les prières de Noël en Palestine
Pour la première fois depuis des mois de silence imposé, des chrétiens palestiniens ont franchi les frontières qui les séparent de lieux saints chargés d’histoire. Le dimanche 23 novembre dernier, les murs de la basilique du SaintSépulcre ont résonné de prières en arabe, portées par une communauté trop souvent tenue éloignée de ses racines spirituelles. Ce moment exceptionnel est venu briser, l’espace d’une journée, la chape de plomb qui pèse sur les territoires.
Pour cette année encore, les célébrations de Noël se résumeront à de simples rites religieux, le faste laissé de côté par respect pour les souffrances incommensurables des familles endeuillées à Ghaza. Les sourires et les accolades sont rares, la douleur omniprésente, mais l’espoir demeure ancré dans les cœurs.
Les autorités religieuses palestiniennes appellent à l’unité, insistant sur l’urgence d’un cessez-le-feu et d’une paix durable. Dans ce contexte sombre, le souffle de Noël en Terre Sainte revêt une signification unique, liée à un acte de résistance pacifique et de résilience face à l’adversité, une prière collective pour la justice et la dignité humaine.
Au Liban, le sapin de Noël illumine les cœurs pleins d’espoir
Alors que le Liban traverse des crises économiques, politiques et sécuritaire étouffantes, et que les cicatrices de la récente guerre israélienne sont encore visibles, les lumières de Noël surgissent comme une étoile guidant les Libanais vers une joie éphémère. Le sapin de Noël, dressé fièrement dans les villes et villages, n'est pas une simple décoration. Avec ses couleurs éclatantes et sa grandeur symbolique, il illumine la résilience d'un peuple déterminé à célébrer la vie, malgré les épreuves et les cicatrices encore visibles des récents conflits.
Chaque lumière qui scintille sur ces sapins porte en elle un message d'espérance, un appel à un lendemain meilleur. À Beyrouth, à Jbeil et dans de nombreuses villes, les marchés de Noël résonnent des rires des enfants et des mélodies festives. Une des organisatrices du marché de Noël dans la capitale, confie à la presse qu’ils voulaient redonner vie au Liban. Noël, pour eux, est une fête pour tous les Libanais, et cela se voit dans la joie partagée par chacun, venu de toutes les régions.
Par ailleurs, dans le sud du pays, les décorations se font plus discrètes. L'ombre du récent conflit israélien pèse encore lourdement sur les villages de Bent Jbeil, Marjayoun et Tyr. À Marjayoun, par exemple la municipalité a illuminé un sapin de Noël avec sobriété, un geste symbolique dans une région meurtrie par les pertes humaines et les destructions. Espérant que la paix revienne et que le Liban retrouve enfin sa stabilité. Malgré les souffrances, l'esprit de Noël s'est frayé un chemin. Dans la région de Jezzine, les festivités se sont tenues sous le signe de l'unité et de l'espérance.
Du nord au sud, des villages de la montagne à ceux des côtes, le Liban, malgré ses drames, s'accroche à la lumière de Noël comme un acte de résistance face à l'adversité. Ce n'est pas seulement une célébration religieuse, mais un cri du cœur d'un peuple qui refuse de sombrer. Les cloches de Noël, aujourd'hui, ne résonnent pas seulement pour la fête, mais surtout pour l'espoir.
En Syrie, Noël est une fête de traditions et de convivialité
Les célébrations de Noël en Syrie, s’inscrivent dans des traditions uniques. Parmi celles-ci, l’allumage d’un feu d’épines sèches, occupe une place spéciale. Cette pratique se déroule après que les enfants eurent récité l’histoire de la Nativité, éclairés par la lumière des bougies. Une fois leur lecture achevée, les bougies sont utilisées pour enflammer les branches d’épines, créant une atmosphère chaleureuse et empreinte de spiritualité.
En Syrie, les festivités ne se limitent pas aux églises et aux foyers. Elles s’étendent à toutes es villes, dans un esprit de joie et de tolérance. De gigantesques sapins de Noël sont installés dans des espaces publics, comme les places ou les jardins situés au cœur des villes. Musulmans et chrétiens, ainsi que des personnes d’autres confessions, participent à ces célébrations avec enthousiasme, partageant des moments de bonheur et d’unité. Une plaisanterie bien connue parmi les musulmans syriens témoigne de cette complicité interconfessionnelle : « Nous avons fêté Noël avec vous, alors n’oubliez pas de jeûner avec nous pendant le Ramadhan. »
Le 25 décembre, les églises organisent des messes solennelles, où les prières s’élèvent dans un recueillement collectif. Ces célébrations se concluent par la distribution de morceaux de pain, une tradition marquant la clôture de chaque office religieux. Dans des lieux emblématiques comme la cour des frères maristes d’Alep, les préparatifs de Noël pour cette année prennent vie dans une atmosphère empreinte de joie et de ferveur. Là où les dialectes des langues araméennes, que Jésus aurait parlées, résonnent encore, les sapins de Noël et les crèches sont dressés, rappelant la profondeur historique et spirituelle de la région.
Noël en Syrie est donc une fête de partage, où traditions anciennes et célébrations modernes se mêlent pour illuminer les cœurs et renforcer les liens entre les communautés, dans un esprit de fraternité et de tolérance.
En Irak, Noël est une fête de partage et d’unité nationale
En Irak, Noël est bien plus qu’une simple célébration religieuse. C’est une occasion pour affirmer l’unité nationale et l’harmonie entre les différentes communautés du pays. Depuis 2020, cette fête est officiellement reconnue comme jour férié par le Parlement irakien, interprétant le respect pour la diversité culturelle et religieuse qui caractérise la société irakienne.
L’arbre de Noël, souvent en plastique, s’illumine de guirlandes et de lumières scintillantes qui créent une atmosphère magique. Une tradition veut que l’on y glisse de petits mots exprimant des souhaits, des prières adressées à Dieu pour qu’Il les exauce, renforçant ainsi l’esprit de recueillement et d’espérance propre à cette période.
Parmi les coutumes locales, celle des anges gardiens se distingue par sa simplicité et sa générosité. Avant Noël, les familles organisent un tirage au sort pour désigner un parent ou un ami auquel chacun devient symboliquement un protecteur. Ce rôle implique de lui offrir un cadeau personnalisé et de veiller sur lui tout au long de l’année.
Pour les chrétiens orthodoxes d’Irak, Noël, après le Carême, est la fête la plus importante. Le soir du 24 décembre, les fidèles se réunissent dans les églises pour des cérémonies qui durent souvent deux à trois heures. Dans un contexte marqué par l’insécurité des dernières années, les lieux de culte offrent un cadre protégé où le Père Noël peut distribuer des cadeaux aux enfants.
Les festivités de Noël continuent jusqu’au jour de l’An, marqué par des feux d’artifice qui illuminent les villes. Ce temps fort est l’occasion pour toutes les communautés de se réunir et de célébrer ensemble, dans un esprit de solidarité et de joie partagé.
Noël en Irak demeure ainsi une fête riche de traditions, où spiritualité et convivialité se mêlent pour réunir les cœurs autour de valeurs communes.
En Égypte, Noël est porteur d’unité et de traditions
Chez les coptes égyptiens, Noël représente un moment de rassemblement et de partage au sein d’une société riche en diversité. La célébration de Noël mêle des pratiques anciennes et des coutumes modernes. Les rues et les maisons s’illuminent grâce aux décorations et aux sapins de Noël ornés de guirlandes colorées. Les enfants, vêtus de leurs habits neufs, s’enthousiasment autour de la figure bienveillante du Père Noël, tandis que les familles se retrouvent autour de tables généreusement garnies de plats traditionnels.
Outre la dimension festive, Noël en Égypte est aussi une occasion pour renforcer les valeurs de générosité et de solidarité. De nombreuses familles profitent de cette fête pour soutenir les plus démunis en leur offrant des repas ou des cadeaux.
Les églises, quant à elles, deviennent les cœurs battants de cette célébration. Des lieux emblématiques tels que la cathédrale Saint Marc, au Caire, accueillent des centaines de fidèles venus assister à la messe solennelle. D’autres choisissent des lieux spirituels comme les monastères de Wadi El-Natrun pour vivre un Noël en toute sérénité. Après Noël, il y’a le 7 janvier, correspondant au 29 Kiahk dans le calendrier copte, cet événement reflète un équilibre harmonieux entre les traditions religieuses et l’identité culturelle égyptienne. Durant cette période, les Égyptiens, toutes confessions confondues, échangent vœux et visites dans une atmosphère empreinte de convivialité et de respect. Le gouvernement égyptien a d’ailleurs annoncé que le mardi 7 janvier 2025 sera un jour férié pour permettre à chacun de participer aux festivités et de renforcer les liens familiaux et sociaux.
Au-delà des traditions, Noël en Égypte reste avant tout un symbole d’unité et de paix, une célébration qui invite à transcender les différences et à renforcer les liens humains dans un esprit de fraternité et d’amour.
Noël en Algérie, un climat empreint de partage et de coexistence
Sur les hauteurs d’Alger, à la basilique Notre Dame d’Afrique, tout est prêt pour accueillir la messe de Noël. Ce monument emblématique, bijou architectural et témoin de l’histoire, se pare de ses plus belles lumières pour célébrer la naissance du Christ dans une ambiance chaleureuse et solennelle.
Généralement, l’intérieur de l’édifice, impeccablement entretenu, brille de mille feux. Les chants traditionnels, portés par les voix du public, se mêleront à l’éclat mélodieux de l’orgue et aux carillons joyeux des cloches, recréant la magie de Noël dans ce lieu sacré. La basilique, ornée pour l’occasion, invite fidèles et visiteurs à un moment de recueillement et de communion, dans une atmosphère de tolérance et d’harmonie. Bien que Noël ne soit pas une fête nationale en Algérie, la capitale offre une expérience particulière. La célébration attire non seulement la communauté chrétienne locale, mais aussi des visiteurs curieux. En plus de la messe de Noël à la basilique, les touristes et les habitants peuvent visiter la Casbah, flâner le long du front de mer ou savourer les spécialités des marchés animés de la ville.
La célébration à Notre-Dame d’Afrique reflète une mosaïque culturelle unique. Ambassadeurs, membres de consulats, résidents chrétiens et même des musulmans se joignent parfois aux prières, dans un esprit de respect et de partage. Le message gravé sur la basilique « Notre-Dame d’Afrique, priez pour nous et pour les musulmans » illustre cette coexistence et cette ouverture qui caractérisent l’Algérie.
Cette année, la basilique d’Alger célèbre un double événement, en plus de la messe de Noël, elle a accueilli, ce dimanche 15 décembre, une cérémonie exceptionnelle en l’honneur de Mgr Jean-Paul Vesco, nouvellement nommé cardinal d’Alger. Élevé à cette dignité lors du consistoire du 7 décembre présidé par le Pape François, le cardinal Vesco est au cœur d’une messe solennelle qui marque un moment historique pour l’archidiocèse et la communauté chrétienne d’Algérie. Une célébration d’une rare intensité, où spiritualité et fierté se mêlent dans la lumière de cette fin d’année.
*Article paru dans le n°44 de notre magazine Iqra.
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