‘‘Il a dit : Place-moi sur les trésors de la terre.
Je suis en vérité un gardien avisé et savant."
La sourate Youssef, verset 55
Au cours du XXe siècle, les crises ont évolué avec la mondialisation au plan des affaires et des avancées technologiques. Cela a donné naissance à une approche moderne de la gestion de crise, axée sur la prévention, la préparation, la réponse et la reconstruction. La gestion de crise est un concept complexe, difficile à définir précisément en raison de la diversité des approches et des définitions qui lui sont attribuées. En sociologie, économie et relations internationales, la notion de « crise » soulève des interrogations sur ses causes, ses caractéristiques et ses conséquences dans un environnement donné. Fondamentalement, une crise se distingue de la « normalité » par sa capacité à perturber l'ordre établi et à rendre inefficaces les mécanismes de régulation en place.
Selon le chapeau de l’article, nous parlerons ici d’une discipline récente, peut-être pas d’une science à part entière, mais d’une spécialité autonome dans le domaine de la gestion, avec ses propres règles, méthodes et théories. Le risque zero n’existe pas et les risques de crise nous entourent de toutes parts, qu’ils soient sanitaires, politiques, économiques ou autres. Une crise signifie une situation complexe nécessitant une solution. De nos jours, les solutions reposent sur des plans stratégiques qui exigent des moyens technologiques avancés. C’est pourquoi certaines organisations ont intégré dans leur organigramme un département de gestion de crise, voire de gestion proactive pour anticiper la gestion et mettre des scénarios avant quelle ne survienne.
Mais que faisaient les sociétés anciennes avant l’émergence de ces sciences et technologies de pointe ?
La gestion de crise économique par le Prophète Youssef
Il faut savoir que les crises les plus courantes sont généralement les crises économiques, entrainant souvent des crises politiques. Combien de régimes ont été renversés à cause d’une crise économique ? Dans cet article, puisque nous sommes dans la rubrique « Récits Célestes », nous nous concentrons sur des crises en lien avec ce thème. La première crise à laquelle nous pouvons nous référer et comprendre sa gestion, est la crise de la famine qui menaçait l’Égypte et les terres environnantes. Le Coran a donné, à travers cet exemple, une leçon de planification économique fondée sur des bases solides et rationnelles.
Allah, Glorifié et Exalté Soit-Il, a accordé au Prophète Youssef (paix soit sur lui) la capacité d’interpréter les rêves, ce qui lui permis de prévoir et d’expliquer le songe du roi. Cela lui conférait unecertaine expertise sur la nécessité de politiques d'austérité à mener, durant les périodes d'abondance. Cette compréhension était la raison de sa demande de poste, citée dans le Noble Coran.
Youssef (paix soit sur lui) est le premier économiste que nous connaissons à avoir utilisé des politiques contracycliques, c'est-à-dire des mesures d'austérité pendant les périodes d'abondance économique. Ces politiques étaient alors mal comprises, mais Youssef possédait la capacité de persuader et de mettre en œuvre ces mesures en raison de sa connaissance des conséquences potentielles. Aujourd'hui, des économistes renommés et la Banque des Règlements Internationaux appellent à de telles politiques pour éviter l'accumulation de déséquilibres macroéconomiques durant les périodes de prospérité, ce qui pourrait conduire à des crises ultérieures.
Une approche visionnaire de la planification économique.
Selon les versets coraniques (47,48 et 49) de la sourate Youssef, le Prophète Youssef (paix soit sur lui) divise sa stratégie de gestion en trois étapes.
La première étape
‘‘Alors (Joseph dit) : Vous sèmerez pendant sept années consécutives. Tout ce que vous aurez moissonné, laissez-le en épi, sauf le peu que vous consommerez.’’
Sourate Youssef, verset 47
La nature prédominante de la première étape est la production, l'épargne et la consommation limitée. Youssef a défini ses plans de production à travers l'agriculture, précisant une production agricole continue pendant sept années de travail assidu sans interruption. Dans ce travail significatif dans la production continue, il y avait une orientation claire sur la consommation, comme en témoigne sa déclaration : « Sauf un peu, que vous consommerez. » (Youssef, 47) Le Prophète a également ordonné la préservation des céréales stockées intégralement intactes, comme indiqué dans le Noble Coran : « Alors laissez-les dans leurs épis. » (Youssef : 47)
La deuxième étape
‘‘Viendront ensuite sept années de disette qui consommeront tout ce que vous aurez amassé pour elles, sauf le peu que vous aurez réservé (comme semence).’’
Sourate Youssef, verset 48
Une fois les sept années de production terminées, avec leur effort constant et assidu et une consommation limitée, le plan a été confronté à un défi majeur. Il faut fournir des ressources pour sept années de disette. C’est à dire, après la production et l'effort assidu de la première étape, il y aurait également un fardeau dans la deuxième étape, qui nécessitait une organisation précise pour garantir l'approvisionnement alimentaire pour tous.
La troisième étape
‘‘Puis, viendra après cela une année où les gens seront secourus (par la pluie) et iront au pressoir.’’
Sourate Youssef, verset 49
Malgré ce fardeau, cette planification précise que ces années maigres ne devraient pas épuiser toutes les économies. Youssef a été clair quand il dit, comme rapporté dans le récit coranique : « Sauf un peu que vous stockerez. » (Youssef, 48). Cette partie économisée servirait de « capital semencier » que les Etats pourront utiliser pour répondre aux exigences après les années maigres, indiquant la réinjection des économies. Les détails de la mise en œuvre peuvent varier, mais les principes fondamentaux restent profondément enracinés dans notre religion et notre patrimoine.
Les aspects de planification et de gestion sont évidents, dans les paroles du Prophète Youssef Essidik (paix soit sur lui), où elle est considérée comme une fonction fondamentale de la gestion qui ne peut pas être efficace sans elle. La planification, en essence, repose sur la prédiction : des objectifs, des politiques, des moyens, des outils, des ressources humaines et matérielles, des procédures, des calendriers ainsi que le budget de l’État. La gestionmoderne, telle qu’enseignée dans les grandes écolesde gestion et de planification souligne que la gestion efficace n'est possible qu'avec une planification solide et proactive, un principe auquel Youssef (paix soit sur lui) avait déjà adhéré, méticuleusement.
Le Coran résume succinctement les paroles du Prophète, mais son plan complet et le développement des ressources humaines y étaient implicites inclus. Le Coran nous enseigne que changer les conditions externes sans se changer soi-même n'apporte pas de changement réel. Youssef a inclus l'élément humain dans son plan, sachant qu'aucun plan ne peut réussir sans les ressources humaines pour l'exécuter.
Son approche dans le traitement des personnes était évidente dans son appel aux prisonniers pour unifier leur adoration d'Allah seul, ce qui était une pierre angulaire dans leur développement. Sa stratégieenglobait des réformes politiques, économiques, sociales, culturelles, éducatives et agricoles, préparées soigneusement dans son esprit.
Ce qui est remarquable dans l'histoire de Youssef, c'est sa gestion scientifique de la crise économique. Cette histoire nous enseigne le cycle économique, qui est une notion étudiée en économie et souvent décrite par des phases de prospérité et de récession. La manière dont Youssef gérait la crise illustre également le concept de budgétisation dans la théorie économique, où l'État détermine ses ressources afin de définir une stratégie de gestion économique globale. Cela inclut également la gestion des recettes et l'équilibre des dépenses. Ce sont des termes techniques qui nécessitent l'explication d'un expert en économie.
Alors, le Prophète Youssef était-il un théoricien économique ?
*Article paru dans le n°28 de notre magazine Iqra.
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