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Lumière et lieux saints de l'Islam, à la découverte des mosquées du monde (n°55) - La mosquée des Djinns


Au cœur de la ville bénie de La Mecque, dans les replis discrets du quartier d’Al-Ghazza, là où les ombres du passé épousent la ferveur du présent, se dresse une mosquée singulière. Elle ne brille pas par la hauteur de son minaret ni par la richesse de ses ornements, mais par le secret qu’elle renferme et le souffle spirituel qu’elle exhale. On l’appelle la Mosquée des Djinns – Masdjid Al-Djinn, ou encore la Mosquée de l’Allégeance, car c’est en ce lieu que se scella un pacte silencieux, dans le clair-obscur d’une nuit prophétique.


Lieu d’un serment invisible


C’est bien ici, dans cette enclave sacrée, que le Prophète Mohamed , envoyé de miséricorde pour les mondes visibles et invisibles, fut approché par un groupe de djinns, ces créatures nées d’un feu sans fumée, discrètes et conscientes. Ils l’écoutèrent réciter le Coran – Parole divine descendue en éclats de lumière – et, touchés au cœur, ils prêtèrent allégeance à celui qu’Allah avait élu comme messager pour l’humanité tout entière. Ce moment est éternisé dans le Livre Sacré, dans la sourate Al-Djinn : « Dis : Il m’a été révélé qu’un groupe de djinns prêtèrent l’oreille et dirent : Nous avons certes entendu une lecture merveilleuse. » (Coran, 72 :1) Nuit d’étrangeté et d’émerveillement, où le ciel s’ouvrit aux êtres de l’invisible, où la foi naquit dans des cœurs que nul regard humain ne peut saisir.


Une mémoire bâtie de pierres


La mosquée qui se tient aujourd’hui sur ce site fut plusieurs fois érigée, ébranlée, puis restaurée. Le mihrab retrouvé à trois mètres sous la terre, enfoui dans le silence d’un sol qui gardait jalousement ses secrets, témoigne d’une continuité invisible. En l’an 1126 de l’Hégire (1714), elle fut reconstruite avec soin. Sous le règne du roi Fahd ibn Abdelaziz, en 1421 H (2000), elle fut agrandie, ses murs vêtus de pierres décoratives, ses contours redessinés à la lumière des arts islamiques contemporains. Mais l’âme du lieu, elle, est restée intacte.


On y entre non pas seulement pour prier, mais pour écouter. Écouter ce que les murs murmurent. Écouter le silence bruissant du passé. Écouter ce verset ancien, qui semble encore vibrer dans l’air : « Et lorsque Nous avons fait se diriger vers toi une troupe de djinns pour qu’ils écoutent le Coran… » (Coran, 46 :29)



À l’ombre du cimetière des saints


Face à la mosquée s’étend le cimetière vénérable d’al-Ma‘lā, où reposent d’illustres figures de l’islam, parmi lesquelles la noble Khadija bint Khuwaylid, épouse bien-aimée du Prophèteﷺ. Ce voisinage sacré enveloppe la mosquée d’un halo de piété et de recueillement. Là, les cortèges funéraires passent, et ceux qui n’ont pu accomplir la prière funèbre à la Grande Mosquée viennent ici, dans cette halte de la mémoire, confier les âmes des défunts à la miséricorde du Très-Haut.


Un carrefour spirituel


Située à quelques encablures de la Mosquée Sacrée, la Mosquée des Djinns est aujourd’hui bordée de routes, de marchés, d’hôtels et de ruelles vibrantes. Pourtant, à peine franchie sa porte, le tumulte du monde s’efface, et l’on pénètre dans une atmosphère suspendue, comme si le temps s’y pliait aux lois d’un autre monde. La lumière y filtre doucement. Les pierres respirent. Et les pas résonnent comme un rappel : ici, l’invisible a rencontré le visible, et l’inexprimable a trouvé un sanctuaire.



Écho du pacte


Le nom même de cette mosquée porte en lui une leçon. Elle est le symbole que le Message de l’islam, dès ses premiers jours, s’adressa à tout l’univers – aux hommes, aux djinns, aux créatures que seul le Créateur connaît. Et que dans cette nuit où la Révélation poursuivait son cours, même ceux faits de feu s’agenouillèrent devant la lumière de la Parole divine.


Que celui qui franchit le seuil de cette mosquée se souvienne : il entre dans un lieu où la foi ne se voit pas toujours, mais où elle se ressent, subtile comme le vent du désert, ardente comme l’encre du Coran, silencieuse comme la prière des djinns dans l’obscurité d’une nuit bénie.



*Article paru dans le n°58 de notre magazine Iqra.



                         

 

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